lundi 21 juillet 2014

Servez-vous d'outils et de techniques sélectionnés par high concept pour améliorer la structure de votre récit et maîtriser les dix règles essentielles qui feront de votre scénario un bon scénario.
Comment commencer à écrire un scénario ? Et surtout, comment écrire un bon scénario ? Voici dix conseils pratiques qui me semblent les plus importants à retenir pour se lancer et travailler le plus sereinement possible à cet objectif. Ces conseils vous aideront à faire le tri entre les fausses bonnes idées et celles qui méritent d'y consacrer plusieurs mois voire plusieurs années.
En effet, quand on est scénariste, des milliers de règles existent et parfois se contredisent sur comment écrire un bon scénario. Il n'y a qu'à voir la bibliographie et l'ensemble des conférenciers sur le sujet. Certains passent leur temps à bouquiner ces règles et n'écrivent jamais rien, quand d'autres les oublient et écrivent au kilomètre (c'est-à-dire mal). Certaines règles sont parfois motivantes alors que d'autres sont inhibantes ou compliquées. Mais au fond, toutes les règles doivent servir à se donner des points de repère. Pour être le plus efficace possible, nous vous proposons avec la méthode d'écriture High concept de simplifier à l'extrême les différents outils de dramaturgie à votre disposition.


  1. Écrire c'est réécrire.
    • Tout le monde a des idées, vous, moi, votre grand-mère ou votre coiffeur. Et si on faisait un film qui raconte l'histoire de X, je suis sûre que cela intéresserait les gens ? Cette phrase, vous l'avez peut-être entendue cent fois. La première différence entre un scénariste et un non scénariste est d'abord la capacité à écrire cette histoire. Tant qu'elle est dans l'air, cette histoire ne vous appartient pas. Si vous passez un mois enfermé chez vous à l'écrire, vous en devenez l'auteur. Alors, certes avoir des idées fait partie du métier, mais cela ne suffit pas. Pour savoir si vous tenez un film ou une série, il faut essayer de les écrire et de les réécrire encore et encore. C'est là bien sûr que la difficulté commence. Une bonne idée au départ peut s'avérer stérile au bout de quelques pages, tandis qu'un vague thème peut vous conduire à broder une épopée. Comment faire la différence ? S'il nous fallait écrire 120 pages à chaque fois qu'on a une idée de film, on serait vite épuisé ! Ce procédé est couteux en énergie et est peu efficace car il génère beaucoup de déchets et de découragement. Que faire ? (voir point ci-dessous)
  2. Écrire c'est créer un concept original.
    • Une idée en soi n'a aucune valeur. Elle appartient à tout le monde. D'ailleurs, plusieurs films peuvent parler de la même idée sans pour autant être similaires. Ainsi, pour commencer à écrire, il ne faut pas simplement s'arrêter au stade de l'idée, il faut pouvoir aller plus loin et la formaliser dans un document qui contient la plus petite unité d'histoire originale (et qui cette fois-ci peut se protéger par le droit d'auteur). Nous parlons ici d'un concept original. Un concept n'est ainsi pas seulement une idée, c'est une mise en forme ainsi qu'une combinaison d'éléments originaux (personnages, déclencheur, objectif, tâche) qui la rend unique. C'est d'ailleurs le point de départ idéal pour travailler une histoire. Avec le 1-2-3 (commencez votre formation en découvrant le 1 du 1-2-3), votre simple idée devient un concept avec un début, un milieu et une fin. Vous maniez des fonctions dramatiques simples (déclencheur, tâche, climax) qui vous permettront de voir votre histoire dans son ensemble. Bien évidemment, plus vous retravaillerez et réécrirez les phrases de votre 1-2-3, plus vous aurez exploré de voies, plus vous saurez où vous voulez aller. Vous vous serez par ailleurs économisé en sauvegardant beaucoup d'énergie mentale. Une fois votre 1-2-3 posé, vous pourrez ensuite attaquer votre continuité (et c'est encore une autre histoire…).
  3. Écrire c'est structurer encore et encore.
    • La plupart des cours sur le scénario font reposer une grande partie de l'enseignement sur la trajectoire des personnages, la maîtrise du thème ou du genre éventuellement et bien évidemment sur la maîtrise de la structure. Ce dernier point est d'une importance vitale pour avoir une vision claire, compréhensible de son histoire. Pourquoi insister autant ? Vous savez qu'il existe trente-six situations dramatiques et qu'il y a de bonne chance, surtout si vous avancez sur un low concept d'avoir une histoire qui ressemble à un moment ou à un autre à quelque chose de déjà fait ou de déjà vu. Une des façons de se démarquer est d'avoir un high concept bien évidemment (c'est ici pour maîtriser les techniques de brainstorming et créer un high concept), mais aussi et surtout une structure bien réalisée, cohérente et qui présente au moins une intrigue principale menée de bout en bout. Tout comme avec un bâtiment ou un pont, l'important n'est pas forcément l'allure mais le fait qu'ils tiennent debout malgré les conditions météo et qu'ils inspirent assez confiance pour nous faire nous y engager sans crainte. Plus vous avancez dans votre art, plus vous pouvez prendre des libertés avec les figures de base de la structure (cf. les scénaristes ceinture noire), cependant, plus votre structure est maîtrisée, moins vous prêterez au flanc de la critique. C'est une chose de ne pas plaire, mais avec une structure maîtrisée, personne ne pourra vous dire que votre projet est nul.

  4. Écrire c'est s'économiser.
    • Les meilleurs scénarios ne sont pas forcément ceux où il se passe énormément de choses avec des univers chargés et de la complexité à gogo, c'est même plutôt l'inverse. Quand votre structure fonctionne à l'économie et à l'efficacité, où chaque élément est assimilable à un domino qui fait avancer l'histoire et que vous ne pouvez pas l'enlever sous peine de faire s'effondrer tout le château de cartes, alors vous savez que vous avez atteint un raffinement et une perfection appréciable. Pourquoi faire de longs discours alors qu'un hochement de tête suffit ? Il vous faut ainsi toujours vous demander si chaque scène en vaut la peine. Pour cela, il suffit de s'imaginer en train de convaincre un producteur : est-ce que cette scène de train avec tous les décors et les acteurs mobilisés vaut la peine ? N'est-ce pas la même que la scène précédente pour le personnage ? En quoi est-elle indispensable à mon intrigue ? Imaginez-vous argumenter avec votre producteur qui doit s'assurer que chaque euro dépensé soit rentable. Tous les aspects d'un scénario sont simplifiables : le nombre de personnages, de décors, d'intrigues, etc. Pourquoi faire deux intrigues parallèles avec deux personnages qui ont la même trajectoire alors qu'une seule suffit ? Enfoncer le clou avec une redondance de scènes qui disent exactement la même chose peut nuire à l'impact émotionnel global de votre histoire. Mieux vaut alors un seul moment fort que plusieurs moments faibles !

  5. Écrire un scénario c'est utiliser la grammaire du cinéma.
    • N'importe qui peut créer un personnage qui ouvre la bouche pour nous parler de sa vie. Certaines personnes le font d'ailleurs avec un certain talent, elles décrivent très bien des situations drôles, poétiques ou déchirantes (dans un roman !). Mais les films et les séries sont d'abord et avant tout des supports visuels. C'est pour cette raison que le langage cinématographique a instauré des codes et des façons de nous montrer ce qu'un personnage pense ou ressent. Une des règles importantes à s'appliquer à chaque fois que nous devons écrire une continuité est ainsi d'écrire le plus VISUEL possible (cf. ce que les Américains appellent le « show don't tell ». Il faut ainsi toujours se demander ce que va voir et entendre le (télé)spectateur. Quelles scènes puis-je créer pour mettre en valeur telle ou telle autre particularité ? Dans quel ordre mettre mes différentes scènes pour générer l'illusion d'une routine ou d'un long espace de temps ? Plusieurs outils existent : les ellipses (jouer avec les effets du montage), les effets de contraste, ou encore les dialogues, qui contrairement à l'usage que certains auteurs débutants en font, ne doivent jamais servir à l'exposition ou à apporter de l'information personnage (cf. notre cours pour étoffer votre palette cinématographique et découvrir les différents moyens de commencer un scénario).

  6. Écrire c'est travailler sur un matériau personnel.
    • Cette règle est très vraie et pourtant parfois stupide. Steven Spielberg n'a pas rencontré E.T. avant de créer le personnage ni des aliens avant de filmerRencontres du troisième type et pourtant, ses personnages d'extra-terrestre nous paraissent aujourd'hui une référence. Pas besoin non plus d'aller sur la lune pour écrire à ce sujet ! Cependant, il est toujours possible de ramener son ignorance à sa propre expérience. Spielberg n'a pas rencontré d'extra-terrestre mais il sait surement quelque chose de l'isolement et de la solitude. De même, en fonction de vos genres de prédilection, vous pouvez vous appuyer sur votre compréhension de la peur, ou de la confiance dans la science par exemple pour écrire sur des sujets qui dépendent de ces valeurs. C'est parce qu'il est difficile de parler d'un sujet qui nous est complètement étranger, qu'il faut au maximum ramener ce sujet à une expérience personnelle. Grâce à cela, vous serez capable de fournir des détails pour rendre vos arènes vivantes et familières (apprenez la technique dédiée en maîtrisant vos arènes du récit). Plus vous aurez réussi à injecter du vécu (ce que les étrangers ne connaissent pas d'un sujet), plus vous aurez de la crédibilité pour instaurer un contrat avec le spectateur (cf. le contrat auteur-spectateur et les mécanismes de l'exorde).

  7. Écrire c'est créer des enjeux.
    • Une histoire ne sera intéressante pour un spectateur que si elle intéressante pour son personnage principal. Si votre protagoniste n'a rien à perdre ou à gagner dans son intrigue, il y a ainsi peu de chances qu'il réussisse à nous intéresser sur la longueur. Inutile de mettre un pistolet sur la tempe de votre héros pour le rendre intéressant, ou de donner à tous vos personnages des enjeux de vie ou de mort (surtout si vous n'êtes pas dans un film d'action) mais il est important que nous comprenions ce que risque votre personnage et ce qu'il a à gagner dans son objectif pour pouvoir apprécier sa trajectoire. Plus vos enjeux seront forts, plus votre histoire sera tendue, plus nous serons intéressés, plus nous aurons envie de savoir la fin.

  8. Écrire c'est rendre crédible.
    • La difficulté d'écrire de la fiction (quand on crée des personnages et des histoires qui ne sont pas réels) réside dans le fait de dire LA vérité quand même. Ainsi, bien que l'entreprise entière d'écrire de la fiction puisse être considérée comme un mensonge, elle est faite pour représenter quelque chose qui est la réalité, c'est-à-dire l'expérience humaine. C'est cette reproduction de la vérité qui va entrer en résonance avec le public et qui nous permettra de nous identifier (Cédric vous a montré d'ailleurs les 3 voies possibles d'identification en scénario). Si nous n'arrivons pas à nous identifier d'une façon ou d'une autre, nous ne pouvons nous attacher à l'histoire et en conséquence, nous nous en désintéressons. L'habileté consiste donc à FAIRE VRAI, à être crédible, à pouvoir faire germer dans la tête de vos spectateurs que si telle histoire se déroulait dans telle arène, elle se passerait probablement comme ça, même si elle se passe dans une galaxie très très loin, ou dans un monde fantastique ou encore dans votre quartier… Ainsi, gérer la capacité du spectateur à croire à votre histoire fait partie du travail du scénariste.

  9. Écrire c'est mettre son ego de côté (au moins pendant l'écriture).
    • Certains auteurs ne veulent plus toucher à un scénario après quelques versions, d'autres glorifient leur talent ou croient à un don et d'autres encore vouent un culte à la création comme s'il suffisait de créer un personnage (même original) pour faire un bon scénario. Écrire est un métier qui s'apprend parfois dans la douleur. On imaginerait pas un sculpteur s'arrêter à sa première ébauche, de même un scénariste doit pouvoir sans cesse remettre son canevas sur la table (dès avant la vente diffuseur parfois). C'est aussi l'enjeu d'un métier (plus que les autres peut-être) collaboratif qui associe plusieurs corps de métier de la production à la réalisation en passant par beaucoup d'autres arts et techniques qui ne se gêneront pour apporter leur pierre à votre édifice. Il y a toujours des aménagements à faire, des choix à décider, des pistes à trouver, etc. Déterminer vos limites sur ces sujets fait partie du travail (et il faut parfois savoir rester ferme dans la tempête), attention cependant à ne pas être trop rigide au risque de vous retrouver tout simplement …au chômage.

  10. Écrire c'est trouver des solutions.
    • Un scénario est un château de cartes qui impose de revoir l'ensemble dès qu'un élément doit être modifié (si ce n'est pas le cas, outre certains détails, revoir le point 4). Lorsque vous rencontrez un problème dans votre histoire qui vous empêche d'avancer, il est parfois tentant d'ajouter de la complexité avec des détails ou des nouveaux personnages. Comment tel personnage peut-il savoir ça à ce stade de l'histoire ? Que fait tel personnage pendant le meurtre ? Ce genre de pensée logistique peut rendre fou et conduit souvent à une complexification des intrigues. L'important est toujours de reprendre la base : vos personnages, leurs archétypes et leurs systèmes de valeurs : quelles sont leurs compétences ? leurs back story ? Leurs pensées sur telle ou telle valeur ? Ne pas oublier ainsi que la réponse à un problème vient souvent du personnage et du point de départ de toute histoire, son déclencheur.

En espérant que cette petite check-list vous serve de boussole, n'hésitez pas à nous donner ainsi vos propres règles dans les commentaires pour partager avec nous vos convictions sur les principales règles à prendre en compte pour écrire.                                                                                      


                                                                                                                                                                            

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